« Que vers moi tes pas accourent,
Que vers moi tes enjambées s’allongent ;
Car j’ai quelque chose à te dire,
Une parole à te communiquer :
La parole de l’arbre,
Et le chuchotement de la pierre,
Une parole que les hommes ne connaissent pas
Et que les multitudes de la terre ne comprennent pas »
( Epopée de Gilgamesh- Mésopotamie IIe millénaire avant JC)
Poème de Baal et d’Anat
L’HOMME VERT, une invention de Dione Fortune en 1936, dans son roman : le dieu aux pattes de bouc ?
Elle a écrit : « Je suppose que vous savez qui est l’Homme Vert ? Il est Pan, il est Jacques dans les bois, il est Sylvanus.. »
Dame Raglan, en 1939 était la première à attirer l’attention de ses lecteurs vers un visage grotesque, avec des feuilles de chêne sortant de ses oreilles et de sa bouche, et entourant sa tête qu’elle avait observé dans une église dans la campagne anglaise. Elle était persuadée que cet étrange personnage n’était pas un dieu ni un esprit ou diable, mais bien un homme, un homme des bois. Donc, elle l’a appelé l’Homme Vert.
Depuis, surtout dans les pays anglo-saxons et nordiques, des centaines d’ouvrages ont été écrits « inventons » les origines de notre feuillu et le traçant jusqu’à la période mésopotamienne.
Comme beaucoup de familles bourgeoise prétendant à des titres de soit disant noblesse, et inventions leur étymologie, nous avons toute une pseudo culture « New Age » qui ont travaillé avec passion et ferveur religieuse pour créer une naissance divine à notre masque de pierre.
L’Homme vert, est-il simplement une image décorative, comme tels les grotesques que nous trouvons dans nos églises et cathédrales chrétiennes, sculpté par les maçons compagnons du 12ème et 13ème siècle pour effrayer les « démons » ?, Ou est-ce que ce masque de feuilles aurait pu avoir une naissance beaucoup plus lointains dans les brumes des cavernes néolithiques de nos ancêtres ?
Pourquoi effrayer les démons de l’extérieur et de l’intérieur de ces lieux saints ?
Peut-être pas-ce que ces églises étaient bâties sur les ruines d’anciens temples païens, près des source d’eau, souvent dans un espace boisés, comme les temenos des Grecs, notre Gemenos. Il fallait utiliser ces anciens dieux, maintenant captifs de la sainte église pour effrayer et éloigner les diables et esprits de ces anciennes religions.
Même les colonnes des ces nouveaux lieux de cultes seraient représenté comme des arbres en pierre, avec leur feuillage décoratif. Il ne fallait peut-être pas trop bousculer les anciens dieux, et leur faire croire que rien n’avait changé dans leurs foret sacré. Naïf, sûrement mais comme tout raisonnement basé sur la magie sympathique et homéopathique, qui marche aussi bien de nos jours.
Il peut paraître avoir tous les attributs d’un archétype, avec une puissance mystérieuse et paradoxale, représentant le bien et le mal. Il est Pan, Lucifer, Humbaba, Dionysos, mais il est aussi Atys , Tammuz, Adonis, Osiris, Asklepius , Moise , Khidr le verdoyant du Coran, St George, Robin des Bois et beaucoup d’autres. Le Christus est souvent représenté comme une vigne, le vin de cette vigne est son sang. Ou il est tout simplement un esprit des bois qui nous aide quand nous sommes perdus la nuit dans la foret de l’inconscience. Une décoration en pierre qui nous regarde et qui entre dans nos rêves pour nous rappeler les anciens temps du Gai Savoir, le langage secret des oiseux, ce que les troubadours appelaient : le langage vert.
Il faut prendre bien note des dates de sa récente découverte ou de sa réapparition. Les années justes avant la deuxième guerre mondiale. L’Europe avait déjà vécu plus de 150 ans de Révolution Industrielle. Haeckel, inventeur du mot : Ecologie en 1867, et malheureusement aussi, un des précurseurs de la pensée nazie, sème les premières graines de ce qui va devenir 66 ans plus tard une politique de « terre et de sang » en Allemagne. Le pays qui allait mettre en place, juste avant la guerre et pendant, une des plus grandes mis en œuvre du « retour à la nature », avec ses parcs naturels et la mise en valeur du paysan cultivant sa terre, les origines pseudo païennes de sa généalogie contre les représentants des nouvelles sociétés, le capitaliste juif par excellence et le communiste juif aussi par excellence. Ils étaient déjà sous l’emprise d’un archétype néfaste et diabolique, comme un des aspects de notre pauvre petit bonhomme vert.
Les romantiques anglais et allemands du 18-19éme siècles ont chantés la nature et inventés un panthéisme primaire qui n’avait pas grand chose à voir avec les idées du grand Spinoza. Ni avec cette Nature qui faisait peur aux hommes qui la côtoyaient tous les jours en labourant leurs champs.
La sensibilité de l’âme romantique, irrationnelle et contre la société matérialiste de l’industrie développant, se baigne au début dans une nature féroce et sauvage ( Shelley : Mont Blanc) et puis se noie dans une décadence de mythologie retrouvée de la quête du Saint Graal et les faux Nibelungen de Wagner, la peinture des Préraphaélites, et puis de Gustave Moreau et les Symbolistes.
La crise était là. Avec les nouvelles usines, la population de la compagne rurale seront obligés de quitter leurs villages et de trouver ou espérer de trouver du travail dans les villes qui grandissent d’une façon pandémique. (De L’enfer)
Le béton des routes, la fumée des aciéries, les chemins dantesques et sombres des mines.
Et voilà, l’Homme Vert surgit !
Je vous laisse décider si notre verdoyant est seulement une invention récente. Si une simple décoration murale a pu devenir un nouveau culte qui disparaîtra comme tant d’autres. Ou si, avec l’éloignement de l’homme de ses racines et d’une vie plus proche avec l’ordre de l’univers ( participation mystique), se produisent des « transmutations alchimiques » dans la psychologie et donc dans l’être profond de l’homme ?
Peut-être notre « psyché » en manque d’une réalité perdue projette un besoin réel en constituant des images diverses et des visages tantôt bons et tantôt maléfiques sur la Nature. Mais ces aspects du même archétype, représentant les saisons ; la mort de la Nature en Hiver et la renaissance au Printemps : Homme vert, Homme sauvage, Arlequin, lièvre que nous trouvons dans toutes les cultures et l’histoire de l’homme nous montre les chemins de ses origines et leur matrice dans les cavernes mésolithiques et puis néolithiques de nos ancêtres ; dans le noir, la fumée et la peur d’une Nature peu sympathique.
Il a peut-être permis à l’Homme de commencer à percevoir une image, avec qui il a pu commencer à dialoguer. Le premier souffle, le premier pas de danse, le premier poème, le premier chant partagé.
La rencontre avec son « ombre » et avec l’autre.
Les premières peintures découvertes dans les grottes et cavernes datent d’à peu près 30 000 ans. Il y avait déjà des langues et sûrement des vers. La poésie rythmée, comme les chants et mouvements de nos jeunes aujourd’hui aux concerts musicaux, permettait un rapprochement entre le macrocosme sombre et dangereux de la vie de l’époque et le microcosme prêt a être découvert de notre inconscience.
La rencontre de l’Ours avec les flèches de ce nouveau Archer.
Car la découverte de l’inconscience permet la naissance de la conscience et le réveil de l’intelligence humaine.
Notre premier langage était vert, en vers et dansant.
L’Homme Vert nous permet de nous souvenir des mots de l’Arbre.
Ses vers plus tard deviendraient les feuilles des livres.
A vous de choisir si ce malin qui se cache dans les forets, les églises, les fontaines et les rues de nos villes est un imposteur. Ou, s’il a quelques choses à vous dire.
Mais, il y a danger.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.