Orphée chante « le Jas au Raisin » !
Quelles sont ces brides de chanson bucolique qui descendent de la Butte à Gémenos ?
Qui est cet Orphée qui fait trembler les feuilles d’oliviers, danser les grappes de raisin, frémir l’écume des vaguelettes de notre beau port ensoleillé de la Commune Libre ?
Les ménades, les satyres et les nymphes de la mer expriment leur joie en chantant et en s’engorgeant du sang des grappes fermes mais douces de notre « Jas au Raisin ».
Est-ce que ce vieux Dionysos : notre cher Marius aurait senti la sève brûlante de la passion recouler dans ses veines, comme dans sa jeunesse ; quand il courait dans la colline après les lapinettes sauvages parfumées au romarin ?
Mireille, la fée accompagnée par la belle Ophélie aurait-elle, un moment entendu le son d’un tambour sur des rives lointaines de fleurs enlacées avec du lierre ; annonçant l’arrivé d’un beau « Gauguin », fier de revenir d’un nouveau monde à sa secousse pour lui apprendre l’art dans la joie et le dessin coquin ?
Est-ce que Florence, jardinière des vignobles céleste et maintenant Marraine de notre Port, aurait retrouvé dans ces vers chantés, la source de son inspiration pour la nouvelle grande aventure de sa vie, ou simplement une idée belle pour raconter à sa petite Anastasie ?
Ce vieux Bernard, sec comme une branche d’arbre tordu, son œil pétillant, aurait gouté encore une fois aux échos de la liberté et des pensées foliques qui lui faisait chatouiller les sentiments des belles dames qu’il rencontrait dans ses ballades, des attouchements pleins d’attention, mais fragiles comme une mère qui soigne son enfant ?
Michel, flibustier des Embiez, vieux salin des salles de bains aromatisée, le « Cavalier Riant » accroché au dos des dauphins; célèbre pour ses petites histoires qui font peur aux enfants, et rougir leurs mamans ; aurait-il, pour un instant entendu, loin dans la colline le carrousel « arc-en ciel » qui tournait dans le village de son enfance, la fanfare, les bruits des enfants qui rient et qui crient, et sentit la claque de sa mère : « Sort ton doigt de ton nez ! »
Ou Luc, bâtisseur de l’arche de Noé, version Plan Cavaillon qui s’accostera à notre marina avec son chargement d’étrange créatures du voisinage, qui aurait sifflé la mélodie d’un de ces aires magiques qui flottaient dans la douce brise de l’après-midi et qui aurait reprit goût à caresser les cheveux aux odeurs de thym de sa belle-aimée avant de l’allonger dans la haie ?
Curt, le sous-marinier en entendant la musique du vent, des cris des mouettes aurait roulé ses yeux et sa tête, comme faisait sa vieille barcasse du « Deutsch-Afrika Line » en fendant les flots sur les rives exotiques du Maghreb avant de mettre pied à terre et affronter les océans du désert ?
La petite matelote Valérie, chérie du sous-commodore, navigatrice des rêves étoilés dans le bleu profond et obscur de la nuit ; berceuse de contes dessinés avec la craie pale colorée des beaux mots, que seulement les enfants comprennent et quelques sages vieux, avec leurs esprit libres ; elle aussi aurait senti ses pieds commençant à bouger comme si une flûte enchantée avait commencé à jouer ?
Et Georges, bien sur, ce galant « Gabinet » tout en belles paroles et fiers de ses nœuds nautiques, tenant d'une main sûre la barre de sa barcasse antique, mais bien rafistolées, avec un mat qui tient bien le coup malgré les nombreuse tempêtes subit après la colère des sirènes, pleurant le départ de leur court « matelou » vers des rivages inconnus.
Il aurait aussi rêvé en écoutant les chants de cette joyeuse après-midi, avant de prendre le grand large vers des plages ou les belles Sénégalaise te font la danse du nombril ?
Le Sous-Commodore, assis sous son palmier et caressant une grappe de raisins arraché à notre première vigne, et rêvant au goût de l’élixir que ce fruit miraculeux allait produire, s’est mis à chanter avec Gilles. Notre lapin à nous !
Car c’est lui le troubadour des Mers, avec sa voix d’Orphée, ses doigts dédaliques, dansant sur un instrument gonflé par le vent, son sourire éclaboussant de joie et d’amitié qui a permit à ce petit monde, un samedi de beau temps, et de Mer si belle, au « Jas au Raisin » de retrouver dans le labyrinthe tortueux de la vie (ces corsaires borgnes fuyant leur destin)
un moment pour rêver.
Leslie J.Vaizey
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